mercredi 28 mai 2008

La Birmanie continue d'ouvrir lentement la porte à l'aide étrangère
RANGOUN (AFP)
La Birmanie continuait mercredi à ouvrir progressivement aux humanitaires étrangers le delta de l'Irrawaddy, la région la plus ravagée par le cyclone Nargis, alors que sa décision de maintenir en isolement l'opposante Aung San Suu Kyi soulevait un tollé mondial.
Plus de trois semaines après le passage du cyclone qui a fait au moins 133.600 morts et disparus et 2,4 millions de sinistrés, les organisations humanitaires faisaient état de signes d'ouverture croissants de la part d'une junte militaire jusqu'à récemment hostile à toute aide extérieure.
De nombreux humanitaires étrangers attendent depuis des semaines un visa pour la Birmanie, tandis que ceux qui sont déjà à Rangoun rencontrent des difficultés à être autorisés à se rendre dans la zone dévastée du delta.
Les différentes agences de l'ONU disposent de plus de 200 personnes à Rangoun. Six travailleurs du Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) et au moins trois du Programme alimentaire mondial (PAM) ont pu se rendre dans l'Irrawaddy, a indiqué Richard Horsey, un porte-parole de l'ONU à Bangkok.
M. Horsey s'est montré optimiste. "Les plus gros obstacles auxquels nous étions confrontés ont été levés. A partir de maintenant, l'effort d'aide va monter en puissance rapidement", a-t-il affirmé, en soulignant que les autorités birmanes ont adopté "une ligne souple".
"On assiste à un peu d'ouverture", a également estimé une porte-parole de Médecins sans frontières (MSF) à Bangkok, Véronique Terrasse.
Après de longues attentes, MSF a pu envoyer une douzaine d'étrangers dans le delta. Cela n'a pas été le cas pour d'autres organisations.
Florian Meyer, de l'association allemande Arbeiter Samariter Bund, a ainsi renoncé à rester en Birmanie après avoir attendu en vain pendant deux semaines à Rangoun une autorisation pour se rendre dans le delta. "Je quitte Rangoun demain avec beaucoup de frustration", a-t-il témoigné mercredi.
"J'ai dix ans de métier dans l'aide humanitaire. J'ai travaillé dans les Balkans, en Iran, au Sri Lanka et au Tchad. Mais jamais, nulle part, je n'avais éprouvé autant de difficultés", s'est plaint M. Meyer.
La Fédération internationale de la Croix Rouge a également indiqué que 30 de ses expatriés à Rangoun attendaient toujours le feu vert des autorités pour partir dans le delta. "Nous n'avons pas de nouvelles, mais nous continuons à espérer", a déclaré son porte-parole John Sparrow.
Le régime birman a fait une concession en annonçant que les particuliers qui affluent spontanément dans les régions affectées par le cyclone pour y distribuer vivres et vêtements étaient les bienvenus.
Jusqu'à présent, les autorités locales faisaient tout pour les dissuader de réconforter les milliers de miséreux massés au bord des routes pour mendier de l'aide aux voitures de passage.
Le quotidien d'Etat New Light of Myanmar a, par ailleurs, lancé un inhabituel appel aux dons privés, demandant tracteurs, carburants et engrais pour les paysans du delta dont les rizières ont été dévastées et les animaux de trait décimés par le cyclone.
Selon le journal, la catastrophe a provoqué un afflux d'eau de mer sur plus de 4.000 km2 de surfaces cultivées. L'ONU et l'Union européenne craignent une famine, alors que la saison du repiquage du riz a théoriquement commencé.
La junte birmane s'ouvre timidement à l'aide étrangère depuis la visite la semaine dernière du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon.
Ce dernier a fait savoir que l'aide aux survivants du cataclysme constituait la priorité numéro un des Nations unies en Birmanie, et que la sortie de l'impasse politique pouvait attendre.
La communauté internationale s'est vivement indignée après le renouvellement mardi pour un an de l'assignation à résidence qui frappe depuis 2003 l'opposante Aung San Suu Kyi.
Le président américain George W Bush s'est dit "profondément troublé", le chef de la diplomatie britannique David Miliband attristé et son homologue français Bernard Kouchner a exprimé sa "plus profonde consternation".

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